Jean Paul – le premier restaurateur français en Géorgie

Les récits de voyageurs français font souvent revivre des personnages méconnus de l’ancienne Géorgie. C’est le cas de Jean Paul – le premier restaurateur français à Tiflis. Le 3 décembre 1827, le journal "Le Figaro", publie une annonce :

"Il existe à Tiflis, en Perse, un restaurateur français nommé Paul. Né en Provence, il servit comme grenadier sous les drapeaux de Napoléon ; fait prisonnier en 1812, il céda aux sollicitations d'un général russe, qui l'attacha à sa personne et l'amena en Géorgie. Il se trouve aujourd'hui à la tête d'une des premières restaurations de l'Asie." 

 


On ne sait pas pour quelle raison le journaliste place Tiflis (aujourd’hui, Tbilissi) en Perse, mais on suppose que cette information a été tiré du récit de voyage de Jean François Gamba, consul de France à Tiflis, publié en 1826. Lors de son voyage de 1822-24, Chevalier Gamba note :

"Nous nous arrêtâmes chez un Provençal nommé Paul, grenadier dans l'armée française, et fait prisonnier dans la campagne de 1812. Il étoit venu en Géorgie avec un général Russe, comme cuisinier, et venoit d'élever à Tiflis un établissement de restaurateur, véritable nouyeauté en Asie. C'est un homme honnête et estimé. Comme il n'avoit pas de chambre à nous donner, nous eûmes recours au maître de police, qui, sachant que le général en chef m’honoroit de sa bienveillance, s'empressa de nous procurer le seul logement dont il pouvoit disposer : il étoit situé sur le bord du fleuve."

Mais l’histoire de Jean Paul ne s’arrête pas ici. Dix ans plus tard, en décembre 1833, Frédéric Dubois de Montpéreux, naturaliste suisse, note dans son carnet lors de son voyage à Tiflis :

"Quand on voulait, pendant mon séjour à Tiflis, faire bonne chère, on allait chez Jean Paul, ancien sapeur des grenadiers de l'armée française, qui fut pris dans la mémorable campagne de l'an XII, et qu'un général russe emmena à Tiflis comme cuisinier. Là, quand le général quitta, plusieurs personnes qui s'intéressaient à ce Jean Paul, connu comme un parfait honnête homme et comme bon cuisinier, lui conseillèrent d'établir un restaurant et lui en firent les avances. Ce brave homme satisfit à leurs vœux en remplissant avec zèle pendant plusieurs années la rude tâche qu'il s'était imposée ; mais fatigué de cette vie bruyante, de tant de soins, Jean Paul s'est retiré à la colonie allemande de Tiflis d'où est sa femme et où il s'est colonisé lui-même, traitant encore néanmoins ceux qui viennent lui demander à dîner avec l'aplomb d'un vrai cuisinier de gastronomes. On lui commande aussi des repas de noces et des déjeuners. Tout en servant avec abondance et choix de mets, il conserve une grande modicité dans ses prix, et pour le voyageur européen en orient qui aime à retrouver sous ce ciel étranger où les mœurs sont si différentes des nôtres, un établissement de ce genre, la maison du bon Salzman, offre une table et des habitudes qui lui rappellent vivement la patrie. Outre cela, Tiflis ne manque pas d'auberges, de cafés, etc."

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 "Habit de Cuisinier".
Gravure sur cuivre de Nicolas de Larmessin. 1695

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